Carnet de route
2017-02-19 LE PAS DU FRENE
Le 19/02/2017 par Lambert Pierre
Mais pourquoi parler de mai ?
Mettons cela en perspective, mêlons méticuleusement les mots et mets que nous maîtrisons.
Ceux qui partiront au col de la Lavoire le week end suivant n'auront pas pu être désabusés par cette partie commune de l'ascension, le délai de cette rédaction ne dévoilant ses particularités qu'après les informations transmises entre encadrants.
Commençons d'abord par le début de cette sortie du 19 février :Sébastien embarque Nicolas, Jean-Louis et Pierre pendant qu'Eric file à la Tour du Pin pour venir avec Philippe M, Jean-Michel et Coline.
Nous nous rejoignons à la sortie numéro 26 de l'autoroute de la Maurienne avant de prendre la direction du col du Glandon : c'est Eric, notre président, qui en a eu l'idée, sa grande expérience ne consistant pas seulement à connaître les situations des débits de boisson mais aussi les sorties d'autoroute équipées de toilettes ; sur ce point, pas question de le railler car le jour où on fait une expé au Louvre, il est fondamental de repérer ces lieux, rares dans ce vieux palais et indignes de la renommée de ce musée ; à part l'illustration du franchissement du grand St-Bernard par les armées napoléoniennes, il n'y aura cependant pas beaucoup de points communs avec les activités du CAF.
Arrivés à St Alban des Villards, une mauvaise surprise nous attend, la route forestière est interdite à la circulation ; c'est un peu embêtant car l'altitude n'est que de 1036 mètres...Jean-Louis est embarrassé car il s'attendait à un faible enneigement et voulait en fait rediscuter de l'objectif de la journée.
«C'est comme au mois de mai ! » lance alors Eric.
Oui et non, car on emprunte en général un sentier qui permet de prendre rapidement de l'altitude, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, nous continuons sur une route pas très rentable. La piste forestière nous fait même perdre un peu d'altitude !
Deux groupes se sont formés, Eric et Philippe qui caracolent en tête et un autre qui discute tout en restant à portée de vue. Par endroits, la piste est recouverte d'une petite longueur de neige gelée et glissante mais nous ne sommes pas dupes, les flancs de la montagne au dessus ou en face de nous sont parfaitement secs sur au moins deux cents mètres de dénivelée.
Et si c'était un exercice inventé par Jean-Louis ? Cette marche un peu contrariante n'est pas interminable et se fait dans la bonne humeur, nous rappelant avec insistance que les armées napoléoniennes ont enduré bien plus de contraintes (et de souffrance, ce qui n'est pas notre cas). «Ceci n'est pas un exercice » peut-on lire dans les messages d'alertes des « plans blancs ». Mais où est le blanc ? May be...Là, c'est plutôt un revêtement feuillu, la neige doit me monter au cerveau !
À la faveur d'un virage en pente particulièrement enneigé, Eric se plaît à croire qu'on pourrait chausser les skis, c'est vrai que l'endroit ensoleillé laisse supposer que la piste le restera au dessus ; comme il y a un petit replat quelques mètres plus haut, une rapide reconnaissance confirme que l'espoir est vain. Cette fois, notre progression est plus rentable et presque cent mètres plus haut, après quarante minutes de marche, nous chaussons enfin ce que nous avons porté avec une certaine appréhension, les flancs de la montagne restant toujours aussi peu revêtus. Il nous faudra d'ailleurs déchausser pour franchir des reliefs insuffisamment aplanis par un manteau neigeux trop fin. Cette petite contrariété pourrait presque devenir une révélation car on aperçoit alors les empreintes délicates des pieds de Coline contrastant avec l'épaisseur grossière de nos chaussures de ski masculines. Blanche neige serait-elle passée par là ? Décidément, cette quête éperdue de vallon enneigé va me faire perdre la raison !
Une petite demi-heure de montée en skis nous permet d'apercevoir le pas du Frêne, objectif de la journée, avec à sa droite le clocher du Frêne dont la pente nord ne semble pas invincible mais c'est vrai qu'il vaudrait mieux s'encorder dans ce cas ; plus au nord, le paysage est marqué par la crête Est-Sud-Est de la pointe du Bacheux qui ressemble à la partie initiale de l'arête Nord-Est de Chomolungma. L'arête ouest du clocher du Frêne invite par sa pente neigeuse à se laisser gravir mais il vaudrait mieux être encordés, tant pis pour cette fois.
La montagne est maintenant uniformément revêtue de blanc et nous avons la joie d'être le seul groupe à remonter ce vallon ; dans les trois cents derniers mètres, un trio effectuant la traversée depuis la pente Est du pic de Frêne nous rejoint et montrera ses grandes compétences en descendant le couloir ouest du pas du frêne pourtant très difficile. Par le col du Gollachon, on aperçoit à l'Est-Nord-Est une énorme canine dont la situation et le nom restent pour l'instant mystérieux : aiguille de la grande Moenda ? Aiguille du fruit ? Dent de la Portetta ? Pointe du Dard ?. La fin de notre ascension est rendue plus difficile par la température printanière, le vent restant léger jusqu'au col proprement dit où il ne fait d'ailleurs pas très froid. Escarpé et étroit, nous réalisons que nous ferons une courte pause sur ce lieu altier mais nous avons le temps de contempler cette superbe Meije et les aiguilles d'Arves, la Barre des Ecrins et les Pelvoux qu'on n'a peut être jamais vu aussi distinctement hérissés. Le temps est superbe, pas un nuage, la marche initiale est un vieux souvenir oublié jusqu'à ce récit.
La descente se fait longtemps au soleil et dans une neige le plus souvent satisfaisante, Nicolas s'offre un couloir pentu qui fait oublier la réputation de relief faussement rassurant des ballons d'Alsace ; nous déjeunons bien au chaud appuyés pour la plupart sur ce qui doit se nommer la cabane du Bâcheux dont les murs extérieurs forment des sièges bienvenus. Jean-Louis fait la reconnaissance de la deuxième partie de la descente qui se fait en rive droite contrairement à la montée et la faible épaisseur du manteau neigeux commence à se faire sentir : nous n'éviterons pas toujours quelques cailloux dans les dernières minutes de notre glisse, le retour vers la vallée laisse percevoir tous ses inconvénients.
C'est presque en bordure d'autoroute que nous trouvons un bistrot pour nous désaltérer mais l'endroit reste calme et peu fréquenté. Le parcours routier lui non plus ne nous a pas retardé malgré le temps perdu pendant la marche d'approche et la fréquentation attendue des stations pendant ce beau week end.
Merci à tous pour ces bons moments partagés ce jour là.
Les photographies ont été prises par Sébastien et devraient bientôt être visibles dans la rubrique photo.
À la prochaine fois.
