Carnet de route
2017-01-29 COL DE LA GRANDE MURAILLE
Le 29/01/2017 par LAMBERT PIERRE
Sortie du dimanche 29 janvier au col de la Grande Muraille en remplacement du Mont Jovet.
Ce récit est dédié à Bruno, encadrant blessé qui ne pouvait donc endurer les contraintes physiques d'une sortie en ski de randonnée; nous lui souhaitons tous une bonne et durable rémission et aussi la patience nécessaire au renoncement à toute une saison de ski. On pense également à Philippe Dayot encore très fatigable pour au moins quelques temps.
Si on évoque les absents, comment ne pas citer Lionel Fargeix, disparu au cours d'une sortie à ski en décembre 2015. La saison de ski doit rouvrir une plaie douloureuse pour sa famille et ses amis proches.
Lorsqu'on part avec des conditions favorables, on pense bien sûr au plaisir de la sortie en groupe, de l'ascension, de la contemplation, de la descente et moins aux drames de la montagne; c'est sans doute dans notre nature ou le résultat de l'influence de notre passion.
La sortie au mont Jovet, superbe belvédère entouré par les massifs de la Vanoise, du Mont-Blanc et du Beaufortain a donc été remplacée et on n'a pas non plus trinqué au terme de la sortie de remplacement. En vérité, on n'a pas trouvé d'établissement ouvert en revenant du massif de la Lauzière, même en s'arrêtant à Albertville. Cette «défaillance» est étonnante de la part d'un encadrant expérimenté, on a d'ailleurs du mal à lui en trouver! Michel avait lui la sagesse de rappeler qu'il était difficile de trouver un débit de boisson ouvert en Savoie un dimanche après-midi.
Considérons cette journée organisée rapidement et efficacement par Eric, encadrant non officiel pour cette sortie du programme initial de cette saison hivernale : quelle belle prestation ! Un site qui offrait une vue superbe sur le massif du mont Blanc, la grande Casse et le mont Pourri alors que nous en étions à peine à la moitié de l'ascension. Qui plus est, malgré l'affluence au point de départ du parcours, nous étions finalement peu nombreux à nous rendre au col nord du sommet de la grande muraille au pied de la Pointe de Colomban, les autres groupes se dirigeant manifestement vers la pointe de Combe Bronsin vers le nord.
Neige peu abondante, alerte pollution, on pouvait craindre une journée moins profitable pour ce groupe de huit : Philippe Morel, Françoise et Pierre, Agnès, Luc et moi-même Pierre L, encadrés par Eric et Michel. Le jour s'est déjà levé lorsque nous passons en contrebas du col du Frêne et de la dent d'Arclusaz, limitant un massif des Bauges qui n'est pas très enneigé, tout comme le grand Arc plus au nord-Est.
Malgré un crochet par le lieu de rendez-vous de la tour du Pin pour récupérer Philippe, Eric nous rattrape au péage d'Albertville, pour nous attendre après avoir bifurqué vers le col de la Madeleine, le coffre de l'autre voiture n'étant pas bien fermé en dépit de l'énergie employée à cet effet.
Alors que nous prenons de l'altitude, le thermomètre extérieur de la voiture indique une température croissante, étant passé de moins 6 degrés Celsius à Chambéry à plus 3 vers 800 m; soit le thermomètre est aussi défaillant que le coffre, soit le moteur 1,4 litres s'échauffe dangereusement dans cette côté exigeante, soit...la journée sera «chaude». Effectivement, bien peu mettront des gants au début de l'ascension et nous n'avons guère froid à l'arrivée au point culminant de la randonnée.
Après vérification des DVA le début du parcours en pente trop douce longe un bois par un sentier juste assez enneigé malgré une altitude de plus de 1300 m, pour ensuite emprunter des alpages sillonnés de traces de rongeurs invisibles à cette heure-ci, le frottement des peaux signalant à la ronde la perturbation que nous constituons.
On aperçoit au loin un groupe qui commence à évoluer en zigzagant à l'approche d'une espèce de bosquet d'arbustes accrochés à une pente qui laisse présager quelque difficulté technique; nous n'entendons pas longtemps le ruisseau pas toujours recouvert de neige, est-ce la sécheresse de décembre qui a fait chuter son débit? On sent parfois le rocher non loin avec les bâtons et on se dit qu'il faudra être prudent dans la descente. La pente assez raide de l'obstacle en question, qui est maintenant tout proche, impose de nombreuses conversions et la progression est rendue difficile par les branches des arbustes dans lesquelles nos skis s'emmêlent parfois. Il faut aussi se faufiler sous des branches basses et une partie du groupe perd un temps certain, Agnès restant avec Eric et Michel pour assister les moins rapides pendant que Philippe et Luc se retrouvent rapidement hors de notre vue, mus par un élan irrésistible vers ce replat supérieur duquel on aperçoit sous un ciel d'un bleu encore limpide, Grande Casse, Mont pourri et bien sûr une partie du massif du Mont Blanc qui est hérissé en avant de l'aiguille des Glaciers, avant que l'arête sud-est de la pointe de Colomban le masque dans la deuxième partie de notre ascension.
L'heure avançant, les encadrants décident de renoncer à la montée vers les Frettes pour nous diriger plus directement vers les flancs de la Grande Muraille; le dôme neigeux qui la surplombe est déjà parcouru par quelques randonneurs et je constate avec regret qu'Eric passe bien trop loin de la trace qui y mène pour espérer y monter. Je comprends mieux ce renoncement lorsque je dépasse une arête est de cette grande muraille, un couloir très pentu imposant aux deux-trois skieurs qui sont en train de le gravir de déchausser pour en finir l'ascension.
Arrivés au col, le panorama est superbe, limité au sud par le Rognolet et le Cheval noir, mais on aperçoit quand même la barre et le dôme des Ecrins, une des aiguilles d'Arves, la dent Parrachée derrière le glacier de la Vanoise et enfin l'Albaron et la Grande Casse.
De l'avis général, Eric ne prend pas assez de temps pour manger, est-ce le sandwich à la Sardine de Michel qui pousse ce vieux loup de mer à plonger vers les Abysses? Ou alors, c'est déjà l'effet de la liqueur offerte à la ronde par le conjoint de Françoise?
La neige ne permet pas un ski très léger mais nous permet de parcourir agréablement le retour vers le village, la Grande Casse restant longtemps visible alors que le ciel a commencé à se couvrir dès midi. Le franchissement du ruisseau nécessite d'être vigilant, faille non bouchée par la neige trop peu abondante. Arrivés en contrebas de Bonneval sur Isère, l'établissement repéré à l'aller est fermé, quelques promeneurs locaux découragent le groupe de se hasarder à monter au château où il serait possible de conclure cette sortie et nous voilà partis pour une traversée tout aussi peu fructueuse des bords de l'Isère à Albertville puisque la théorie de Michel est malheureusement confirmée.
L'objectif de ce dimanche de janvier a néanmoins été atteint, cette randonnée à ski (une des premières cette saison pour beaucoup d'entre nous) était superbe, par un temps magnifique et l'adaptation des encadrants idéale pour compenser une procédure qu'un agent administratif zélé oserait qualifier de dégradée. On attend de toute façon avec impatience de pouvoir partir avec Bruno au mont Jovet.
Merci à tous pour ces bons moments en commun.
Pierre Lambert





